Page d’accueil Engagement Politique Accord de libre-échange Suisse - Inde « Nous avons en permanence 150 à 200 apprenti/es dans nos entreprises indiennes »
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« Nous avons en permanence 150 à 200 apprenti/es dans nos entreprises indiennes »

Le 20 mars, l’accord de libre-échange avec l’Inde sera débattu au Conseil national. Pour l’industrie tech, il s’agit d’un accord extrêmement important, car il stabilise et simplifie l’accès à ce marché de 1,4 milliard d’habitants, non seulement en matière de droits de douane, mais aussi parce qu’il supprime la bureaucratie et simplifie l’échange scientifique. C’est aussi la raison pour laquelle Dipak Mane et Stefan Scheiber, tous deux à la direction du groupe Bühler, s’engagent activement pour cet accord. Vous trouverez aussi l’entretien en entier sous forme de podcast et de vidéocast dans notre nouveau format « TecTalk ».

Dipak Mane, tu as fait des Ă©tudes d’ingĂ©nieur en Inde et tu as rejoint le groupe BĂĽhler il y a 30 ans lorsqu’il a commencĂ© son engagement dans ton pays d’origine. Connaissais-tu ce nom suisse, « BĂĽhler Â» ?

Mane : Non, je ne savais rien de BĂĽhler. J’ai demandĂ© Ă  des gens qui connaissaient un peu BĂĽhler et la Suisse, et ils me l’ont confirmĂ© : ce nom est vraiment synonyme de savoir-faire technologique. 

30% de la rĂ©colte en Inde est apparemment perdue avant d’arriver dans l’assiette. En Inde, BĂĽhler produit des machines pour la transformation alimentaire. Pouvez-vous rĂ©duire ces pertes grâce Ă  votre technologie ?

Mane : Oui, jusqu’à un certain point, sans pour autant les empĂŞcher complètement. 

L’accord de libre-échange entre la Suisse et l’Inde diminue notamment les droits de douane. Il facilite également l’échange scientifique au niveau universitaire, tout comme les relations avec les autorités. Le groupe Bühler est présent depuis longtemps en Inde – cet accord de libre-échange vous apporte-t-il quelque chose ?

Stefan Scheiber : La collaboration avec les institutions de recherche et les universitĂ©s est justement un thème d’actualitĂ© en Inde : nous sommes en compĂ©tition pour attirer une main-d’œuvre de qualitĂ©. Et l’échange permanent est très important. Ce sont lĂ  d’importants thèmes soutenus par l’accord de libre-Ă©change. 

Il n’en va donc pas seulement des droits de douane et des avantages commerciaux, mais bel et bien de collaboration ?

Scheiber : Oui, absolument. L’Inde Ă©tait et est toujours, pour de nombreux Suisses et EuropĂ©ens, quelque peu un mystère, un Ă©norme pays au potentiel incroyable. Mais quand il s’agit de faire des affaires, on se retrouve face Ă  des obstacles bureaucratiques et il y a de la corruption, regardons les choses en face ! 
Un accord de libre-Ă©change offre l’assurance que l’on peut se fier au partenaire – c’est un aspect très important. 

BĂĽhler exporte la technologie et le savoir-faire en Inde, mais en Suisse, des voix critiques s’élèvent contre cet accord du point de vue des droits de l’homme et de la durabilitĂ© : l’Inde n’en ferait pas assez dans ces domaines. ĂŠtes-vous d’accord avec cela ?

Mane : Il faut d’abord jeter un Ĺ“il sur le passĂ© et l’évolution. L’Inde vient seulement d’arriver sur la scène mondiale. Et c’est donc maintenant que ces questions sont abordĂ©es. Les entreprises sĂ©rieuses peuvent observer en grande partie les normes internationales, tant sur le plan des droits de l’homme que sur celui de l’environnement et de la durabilitĂ© –­ sans perdre en compĂ©titivitĂ©. Mais le chemin Ă  parcourir est encore long. 

La politique suisse aura-t-elle une influence sur la politique indienne via cet accord de libre-Ă©change ? Est-ce que cet accord changera quelque chose en Inde ?

Mane : Je ne pense pas que cet accord puisse aborder les grands dĂ©fis de l’Inde de manière globale, mais il peut le faire Ă  petite Ă©chelle. Ce sera bon pour les deux pays. 

Les critiques de la gauche et des Verts Ă  l’égard de cet accord de libre-Ă©change concernent la situation des droits de l’homme et la protection de l’environnement. Maintenant, en tant qu’entrepreneur, tu pourrais dire : ce n’est pas très important pour nous, le principal c’est que les affaires marchent bien. Ces thèmes vous intĂ©ressent-ils sĂ©rieusement ?

Scheiber : C’est une question importante, car il est très typique de la part de la gauche de soulever ces questions en rapport avec l’industrie. Cela montre que la gauche ne comprend pas rĂ©ellement ce qu’est un comportement Ă©conomiquement responsable.   

C’est un reproche sĂ©vère. 

Scheiber : Nous sommes une entreprise familiale. Cela fait 30 ans que nous dĂ©veloppons nos affaires en Inde. Il ne nous serait jamais venu Ă  l’idĂ©e de mettre en place un quelconque double standard, que ce soit en matière de qualitĂ©, de durabilitĂ© ou de sĂ©curitĂ©. Nous investissons depuis 30 ans dans des personnes que nous avons embauchĂ©es en Inde, qui ont grandi avec nous, qui ont contribuĂ© Ă  dĂ©velopper nos standards et qui les vivent dans leur famille ou dans leur rĂ©seau de sous-traitants, ou encore dans le cadre de la collaboration avec les clients. Avec nos collaborateurs et nos collaboratrices, nous avons accompli un travail titanesque au niveau de la responsabilitĂ© sociale et durable, de la sĂ©curitĂ©, etc.
Ă€ ce sujet, je peux vous raconter une histoire qui a eu lieu durant la pĂ©riode du coronavirus : en Inde, la pandĂ©mie a Ă©tĂ© un très grand problème Ă©galement parce qu’il y a beaucoup de travailleurs migrants. 

Beaucoup d’Indiens vivent effectivement presque toujours dehors.

Scheiber : Oui, absolument. En Inde, le taux d’infection Ă©tait très Ă©levĂ©. Notre chef indien a commencĂ© par tester tous les collaborateurs et collaboratrices en permanence, leur procurant ainsi une certaine sĂ©curitĂ©. Ensuite, il a organisĂ© une vaccination locale, a invitĂ© les clients, les membres d’entreprises, les fournisseurs Ă  se faire vacciner. Il faut s’imaginer, c’était un rĂ©el festival de la vaccination ! Alors qu’au mĂŞme moment, des feux brĂ»laient dans la ville de Bangalore, oĂą les morts Ă©taient incinĂ©rĂ©s. 

On avait donc de la chance si l’on se trouvait dans l’entourage de BĂĽhler ?

Scheiber : Exactement, voilĂ  pour la responsabilitĂ© sociale et d’entreprise ! Et lĂ , la gauche tente de fabriquer de toutes pièces une opposition entre notre Ă©conomie en Inde et en Suisse... Pourquoi devrions-nous avoir d’autres standards en Inde qu’en Suisse ? Cela ne nous viendrait jamais Ă  l’idĂ©e. 

C’est peut-ĂŞtre une drĂ´le de question, mais je vous la pose quand mĂŞme : l’accord de libre-Ă©change rendra-t-il l’Inde plus suisse, ou l’inverse ?

Mane : Cela ne risque pas d’arriver. MĂŞme si l’on considère l’ensemble du commerce entre la Suisse et l’Inde, il serait trop petit pour avoir de telles rĂ©percussions. Mais cet accord va dĂ©finitivement rapprocher les deux pays et je suis sĂ»r qu’ils peuvent tous deux profiter l’un de l’autre. 

Scheiber : J’aimerais aussi dire quelque chose Ă  ce sujet, car c’est une très bonne question. Dipak et moi-mĂŞme sommes amis et travaillons ensemble dans cette entreprise depuis 30 ans. Ce que nous apprĂ©cions le plus l’un chez l’autre, c’est que nous sommes très diffĂ©rents ! Je n’essaierai jamais de faire de Dipak un Suisse, tout comme Dipak n’essaiera jamais de faire de moi un Indien. Ce qui est prĂ©cieux, ce sont nos diffĂ©rences, nous en profitons ! C’est enrichissant et prĂ©cieux pour notre parcours de vie. 

Ok, donc qui en profitera le plus, l’Inde ou la Suisse ? 

Mane : Sans connaĂ®tre les dĂ©tails de l’accord, je peux dire que les deux parties en profiteront. Les petites entreprises en profiteront plus que les grandes organisations telles que BĂĽhler, ABB ou NestlĂ©. L’accord leur facilitera beaucoup de choses et leur permettra des transferts. Je m’en rĂ©jouis particulièrement. 

Une dernière question en rapport avec les petites entreprises, puisque tu les mentionnes : le groupe BĂĽhler est extrĂŞmement engagĂ© dans la formation – en Inde aussi ?

Mane : Au cours de ses 165 ans d’histoire, BĂĽhler a toujours cru que ceux qui forment sont aussi ceux qui sont en tĂŞte dans la branche. En Inde, toute une acadĂ©mie BĂĽhler a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e, oĂą nous appliquons lĂ  aussi le système de formation duale de la Suisse, d’ailleurs certifiĂ© par Swissmem. Nous avons en permanence 150 Ă  200 apprenti/es dans nos entreprises indiennes. La formation est dans l’ADN de BĂĽhler, en Suisse comme en en Inde. 

Interview : Michael Perricone

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L’entretien complet est disponible sous forme de podcast ou de vidéocast sur les plates-formes et sites suivants :

Dernière mise à jour: 04.03.2025